Song ▬ Perdu. Encore. Une nouvelle fois tes pas t’avaient mené à un endroit, et tu ne savais absolument pas comment. Une nouvelle fois tu mettais cela sur le dos du destin. Si tu étais ici c’était pour une bonne raison, à toi de découvrir laquelle. Chaussures à la main, tu marches doucement sur le sable encore tiède. A l’horizon le soleil se couche et recouvre la mer d’un voile rouge orangée. Tes yeux se perdent dans cette immensité. La mer, voilà un endroit réellement magique, bien plus que cette ville. Calme un jour et mortelle le suivant, origine de la vie et cause de la mort, elle te rappelait que dans ce monde rien n’était acquis, que tout pouvait changer du jour au lendemain. Tu soupires à l’idée de rester ici, de contempler ce paysage fantastique pendant des heures, peut-être même toute la nuit, jusqu’au lever du soleil.
« Ça me fait penser à une piscine géante. Dommage que je n’ai pas pris mon maillot de bain … ». Jamais à court de phrase montrant que ton âge mental se rapproche plus des six ans et demi que des vingt décidément.
Tu décides de t’assoir. Un vent frais vient caresser ton visage et passe dans tes cheveux verts. Comment ne pas aimer un tel endroit. La journée peut-être, mais il n’y a plus personne à cette heure. Les enfants étaient rentrés chez eux, endormis sur la banquette arrière de la voiture, pendant que les parents se rappelaient les moments heureux de la journée. Après tout, le monde ne pouvait être que mignon, comme dans les dessins animés. La cruauté, la méchanceté, la souffrance étaient autant de chose que tu avais balayée de ta vie en arrivant à Equilibrium. Pourquoi avoir rejoint un gang dans ce cas, me direz-vous. On pourrait tout résumer en une expression : t’as vu de la lumière, et t’es rentré. Tu n’avais aucune idée que qui était le chef, tu savais vaguement où se trouvait le quartier-général mais sans plus, et toute cette guerre pour des territoires te passait largement au-dessus de la tête. Tu étais rentré dans le gang de l’est parce qu’ils n’avaient pas l’air si méchant, et puis de cette manière tu pourrais peut-être mettre ton pouvoir au service d’une bonne cause. Finalement personne n’avait eu besoin de toi, faut dire que tu n’étais pas allé vers les autres non plus …
Tu es tellement naïf. Tu te caches derrière un masque de gamin innocent, mais en réalité tu as peur de ce monde. Tu ne comprends pas comment des personnes peuvent s’entre-tuer ou se faire la guerre, tu ne sais pas ce que cela fait de tuer quelqu’un ou même plus simplement de le frapper. Tu es comparable à une fleur blanche sur un parking. Fragile et faible tu attends de te faire cueillir par une main délicate, mais tout ce qui t’attends c’est une voiture pour t’écraser sauvagement. La vie n’est pas cruelle Yukio, c’est juste toi qui est trop stupide pour voir le mal partout. Ce mal tu le fuis. Tu le fuis et en même temps tu vas vers lui. La curiosité est un vilain défaut, tu le sais pourtant. Un jour elle te coûtera cher, peut-être bien plus tôt que tu ne le pense. Mais en attendant l’heure fatidique reste dans ton monde de rêves et de douceurs. Continue à voler parmi les nuages en guimauve, à courir dans les champs de bonbons ou à plonger dans les rivières de chocolat. Oui, pense à autre chose, croit que le mal ne s’acharne que sur les autres, qu’il t’épargnera car tu t’habilles en vert et que tu souris même aux sans-abris. Personne ne sera là quand tu tomberas du haut de ton trône, car au fond, tu es bien seul.
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